Lorsque la société évoque le « Monde de la Culture », c’est très souvent en faisant un raccourci évident avec le monde du « divertissement ».
Or la Culture est bien plus que ça. elle est aussi à la base d’une organisation sociale. Ses composantes permettent d’articuler son fonctionnement. On peut très bien parler de Culture d’entreprise, ethnique, ou encore artistique.
Nous portons l’idée que la Culture, au sens artistique, a un rôle essentiel quant à l’émancipation des citoyens et citoyennes de notre Nation, au regard de l’évolution de nos civilisations. Son rôle est majeur dans la construction sociétale.
En effet, nous considérons qu’une société démocratique en bonne santé ne peut s’extraire de ce pilier qui permet aux consciences de s’ouvrir sur le Monde et par conséquent sur « l’autre ».
De par ses formes diverses (Musique, Théâtre, Danse, Cinéma, Peinture, Arts plastiques, Littérature…), l’expression artistique permet de faire réfléchir sur l’environnement qui nous entoure, de se forger une conscience propre et de fait, se fabriquer une pensée indépendante et citoyenne. Elle peut très bien se transmettre via des secteurs tels que l’animation ou le sport (les derniers jeux Olympiques de Paris en ont été un exemple concret).
Les Artistes ont toujours créé et ancré des « pages » entières de nos civilisations, en particulier de notre civilisation occidentale. Le monde culturel est donc un passeur d’idées novatrices, de concepts originaux qui s’appuient également sur d’autres cultures, qu’elles soient issues de notre territoire, ou bien importées bien au-delà de nos frontières. Les époques sont très souvent le reflet de la richesse culturelle qui les traverse, laissant ainsi en héritage, aux générations successives, un patrimoine culturel fondamental pour leur propre évolution.
La société française a souvent subi des transformations sociétales profondes et majeures du fait d’une influence prégnante des acteurs culturels (pour ne pas dire Artistes) sur les représentant(e)s et les actions politiques comme l’abolition de la peine de mort ou encore les Droits des femmes.
Par conséquent, le monde de la Culture a très souvent une emprise sur le monde politique. Il peut infléchir certaines visions politiques.
Le partage, l’accès à ce patrimoine accumulé au fils des siècles doit être une force pour mieux appréhender notre Histoire commune, comprendre d’où nous venons et ce qui a construit la richesse multiculturelle de notre société. Le patrimoine n’est pas que le monopole du passé. Il se construit au présent également.
D’aucuns diront que le reste du Monde est envieux du modèle proposé.
Si nous parlons souvent d’exception culturelle française, elle est tout d’abord marquée par le fait d’une intervention importante de l’Etat notamment dans le domaine de la création artistique et, de la sauvegarde du patrimoine :
- un soutien accru à la création artistique et au développement des entreprises culturelles (subventions/ mécénats).
- de par son modèle social plus protecteur qu’ailleurs : les salarié(e)s intermittente(e)s du spectacle vivant bénéficiant d’un régime d’indemnisations chômage (artistes et techniciens), que nous pouvons assimiler désormais à un complément de salaire, malheureusement.
- Une reconnaissance unique au Monde du droit d’Auteur.
Si cela participe grandement au rayonnement de notre pays, nous ne devons pas nous contenter des « paillettes » mais considérer que cela soit un socle solide pour bâtir une société plus ouverte, et plus à même de penser par soi-même. Par conséquent, il faut considérer à leurs justes valeurs les acteurs du secteur culturel et ne pas minimiser l’impact significatif de leurs rôles. En premier lieu, cela doit passer par une reconnaissance de l’Artiste, cela entraînerait un effet en cascades sur tout le secteur.
Dans un Monde qui devient de plus en plus tendu, instable, dangereux, mettant en péril nos démocraties perfectibles (avec tous les défauts que celles-ci comportent), il est urgent d’acter que les acteurs culturels constituent les fondements du rempart contre les replis sur soi, les communautarismes, les extrêmes.
Le secteur culturel doit être un sanctuaire qui permet, l’audace, l’impertinence comme la pertinence, d’avoir le courage de pointer de vrais sujets de sociétés, de les dénoncer et de ne pas s’interdire de proposer des pistes de solutions, en somme d’innover ; d’éduquer aux différences, au vivre ensemble, enfin de transmettre et d’être au cœur de la construction sociétale. Cette émancipation de l’humain que permet l’intérêt à la « chose culturelle » doit renouer fortement avec l’éducation populaire si chère à Edmond Maire*. Cela nécessite de s’appuyer sur l’ensemble des salarié(e)s du secteur, la force de propositions des associations culturelles, les différentes structures d’employeurs, l’Etat. Les syndicats concernés doivent prendre leur part de manière constructive.
Pour nous, il y n’y a pas de « Grande Culture » et de « Culture à la marge ». Toutes ces composantes participent à la richesse de la création culturelle, du patrimoine qui en résulte, par conséquent à la vie de nos territoires.
Nous considérons, en outre, que les pratiques culturelles et artistiques doivent prendre une place prépondérante tout au long du parcours scolaire en intégrant de manière significative les programmes. De fait, l’École (à tous ses niveaux d’enseignements) est le lieu le plus approprié pour une transmission la plus équitable possible. Une société plus juste passe par l’égalité des chances. L’accès à la Culture ne doit pas se contenter de saupoudrages accumulés mais d’un ancrage issu d’un réel projet de société.
Le Monde culturel ne peut se contenter d’être sous considéré quand il représente une force économique puissante, générant 2,3% du PIB soit 100 milliards d’euros ; pesant ainsi 7 fois plus sur l’économie de notre pays que l’industrie automobile. Les acteurs de la Culture méritent donc une attention à la hauteur de la part des politiques publiques. Le Ministère de la Culture ne peut pas être le Ministère des variables d’ajustements budgétaires des visions politiques à court terme.
La Culture doit être au cœur du projet et de la construction de notre société, d’aujourd’hui et de demain, émancipée, reposant sur l’idée même du vivre ensemble.