Madame la Ministre de la Culture et de la Communication,
Dans ce contexte de travail sur l’emploi dans le secteur, de concertation sur la liste des CDDu éligibles aux annexes 8 et 10, de concertation préalable aux discussions législatives sur la loi Liberté de Création, Architecture et Patrimoine (LCAP), cette réunion du CNPS est la bienvenue.
Concernant les CDDu et leur éligibilité aux annexes 8 et 10, la Fédération Communication, Conseil Culture de la CFDT est favorable à une articulation entre l’interprofessionnel et les branches, pour travailler sur la liste des métiers éligibles aux annexes 8 et 10 de l’assurance chômage.
Mais, parce que nous ne pouvons nous limiter à la simple gestion de la question du chômage et qu’il faut aussi poursuivre notre combat contre la précarisation et la paupérisation des salariés du secteur, il nous faut aussi travailler sur la pérennisation des emplois actuellement occupés sous la forme de CDDu successifs. Notre lutte s’inscrit également dans les branches afin de limiter la précarité.
Or, nous risquons de voir ce travail vidé de son sens, s’il n’a pour seule conséquence le transfert de cette précarité dans des secteurs connexes.
Nous souscrivons à une articulation entre négociation multibranche pour définir les principes de la réduction de la précarité et négociation de branches pour en définir l’application concrète.
De notre point de vue, cette négociation pourrait acter l’interdiction du portage salarial comme forme d’emploi ouvrant droit aux annexes 8 et 10.
Pour la F3C-CFDT, cette négociation de branche doit permettre de déterminer la liste des professions permettant l’utilisation de CDD d’usage sous certaines conditions et d’autre part, les CDD d’usage qui ouvrent droit aux annexes 8 et 10 de l’assurance chômage sous des conditions à déterminer.
Une telle négociation de branche doit être l’occasion de mettre en place un système de labellisation des entreprises afin de les inscrire dans une dynamique vertueuse, dynamique qui leur manque pour certaines cruellement à ce jour.
Enfin, cette négociation doit déterminer concrètement les conditions de passage du CDDu au CDI et également, la manière dont des postes occupés par des successions de contrats d’usage pourraient être sécurisés par des postes nécessairement occupés par des CDI.
Au risque de nous répéter, Madame la Ministre, négocier veut dire convier – dans un premier temps – les parties à la discussion.
Pour la CFDT, la règle est simple : au niveau des branches où la représentativité est mesurée, c’est cette mesure qui fait foi. Ailleurs, c’est-à-dire dans les différents niveaux de l’interbranche, cela ne peut se faire que par le cumul des représentativités des branches qui composent cette interbranche.
Il ne peut y avoir l’ajout de telle ou telle entreprise ou organisme. On ne détermine pas la représentativité par le fait du prince, pour satisfaire les obligés de ce même prince !
Cette mesure doit ensuite faire l’objet d’un arrêté. Ce n’est qu’en procédant ainsi que l’on stabilisera la capacité à engager les salariés.
Evidemment, l’absence de couverture conventionnelle globale de l’audiovisuel est une difficulté. Même si cela nous préoccupe moins, il conviendrait d’en faire de même pour la partie patronale.
Nous avons constaté la convocation de 10 CMP et nous nous en félicitons.
Pour autant, Madame la Ministre, nous souhaiterions vous interroger sur le cas des artistes et techniciens de la filière Spectacle, née par l’accord du 10 mai 1996 instituant une annexe spectacle dans la CCN des espaces de loisirs, attractions et culturels.
Peut-on considérer les non-permanents de ces artistes et techniciens comme des ayants-droit aux annexes 8 & 10 ?
Si c’était le cas, nous ne comprenons pas pourquoi la liste des métiers éligibles en CDDu ne serait-elle pas revue comme les dix autres branches ?
Dans l’affirmative, nous vous demandons de réintroduire cette convention collective dans la liste proposée aux partenaires sociaux.
Pour conclure sur les annexes 8 et 10, notre fédération se félicite de la mise en place d’une commission d’écoute pour les intermittents du spectacle dans le cadre de Pôle Emploi.
Revenons un instant sur la loi Liberté de Création, Architecture et Patrimoine :
Il est important de considérer la genèse de ce texte. En effet, la difficulté aujourd’hui de compréhension de texte tient à sa construction : des deux lois prévues par Aurélie Filippetti, lors de son mandat, il a été décidé de n’en faire qu’une (Loi Patrimoines et Loi dite LORCA).
A l’heure où la création artistique est en pleine mutation et souvent remise en cause affectant la liberté de créer, les choix artistiques des créateurs et, de plus en plus, la relation du citoyen à la Culture, il est essentiel d’envisager une reconnaissance législative.
Cette démarche est méritante mais la proposition faite est faible, pauvre et assez affligeante voire, consternante. En effet, par cette loi, nous nous devons de traiter de la création artistique comme liberté fondamentale reconnue par la jurisprudence de la Cour Européenne qui fait explicitement référence à « ceux qui créent, interprètent, diffusent ou exposent une œuvre d’art contribuent à l’échange d’idées ou d’opinions indispensables à une société démocratique » Cour Européenne des Droits de l’Homme du 24 mai 1988 – Müller c/Suisse.
Aussi, si nous analysons l’article 1, celui-ci affirme que « la création artistique est libre ».
La formule est bien triste et vide de sens. En posant le sujet ainsi, la création artistique est considérée comme objet, objet de consommation ou objet marchand. La liberté ne peut être assimilée qu’à un être humain. Cette confusion du MCC relève d’un vrai choix politique visant à considérer la création artistique uniquement comme valeur marchande. Cette approche est extrêmement réductrice et finalement nous pouvons nous demander ce que défend le ministère ? Est-ce un ministère de produits ou de biens culturels ?
Les difficultés récurrentes de l’audiovisuel public ont récemment franchi de nouvelles frontières. La CFDT attire l’attention du ministère sur le caractère impératif de disposer d’un processus de désignation des différentes directions des entreprises de l’audiovisuel, qui soit cohérent, transparent et incontestable. De même, iI apparaît que la probité des dirigeants doit être un critère tout aussi déterminant.
A ces récentes difficultés s’ajoutent un défaut chronique de financement, un manque de projet global et d’objectif commun qui caractérisent depuis bien longtemps maintenant les diverses entités de l’audiovisuel public.
La grève de cet hiver à Radio-France en est d’ailleurs une conséquence. La CFDT a également toujours du mal à discerner, en dépit de certaines bonnes volontés ponctuelles ou d’initiatives isolées, une véritable politique de sécurisation des parcours professionnels et ce, dans un contexte d’évolution des outils et de l’organisation du travail lié au renouvellement permanent des technologies numériques.
A ce propos, nous voulons à nouveau attirer votre attention sur la situation des salariés d’Eclair. Cette entreprise historique ne doit pas disparaître et ses emplois avec elle. Tout doit être fait pour maintenir une activité réalisée par des professionnels dont les qualités et le talent sont mondialement reconnus et ont pu être constatés à nouveau, lors du dernier festival de Cannes, en la présence du Premier Ministre, avec la projection du film hommage aux Frères Lumière et dont la restauration est due au savoir-faire d’Eclair.
Enfin pour conclure, Madame la Ministre, les organisations syndicales, ici représentées, vous ont écrit pour vous alerter sur la situation des conservatoires qui ne bénéficient plus des aides accordées par le Ministère de la Culture et de la Communication.
Je vous remercie !